Hangman's Chair
Roster / Bernard Moisse
Si leur dernier EP Bus de nuit (novembre 2019) arborait déjà une coloration cold wave, jamais on n’a si peu senti les racines hardcore du groupe en activité depuis 2005, ni même l’aspect doom présent sur ses disques précédents. Car si doom il y a, c’est surtout du côté de certains riffs et de l’emphase épique un peu mauves du Psalm 9 de Trouble, mais délavés à du Paradise Lost (« Cold and Distant ») et surtout du The Cure (« The Pariah and the Plague », « Who Wants to Die Old »…) avec une gravité réinventée où, bizarrement, la lourdeur vous tire vers le haut.
Musicalement, la référence au groupe de Robert Smith s’impose et a d’ailleurs, pour l’anecdote, inspiré aux Parisiens le titre de leur LP. Un article de presse leur était en effet resté en tête, qui présentait Faith comme « l’album du solitaire », soit une œuvre à écouter seul au casque. Bientôt, la remarque sur l’album gris leur soufflerait le syntagme « A Loner », mais il faudrait d’abord en passer par une série d’événements difficiles voire cruels, comme pour Banlieue triste (mars 2018). Décès de proches, déceptions (« A Thousand Miles Away », « Second Wind »), dépression et repli sur soi (« An Ode To Breakdown », « Cold and Distant », « Who Wants to Die Old »), les démons ont devancé l’auditeur sur le pont, et malheureusement accompagné chaque étape de la création de cet élégiaque A Loner. D’où l’importance de le peaufiner, dans les compositions comme le son, notamment au moment de l’enregistrement au Studio Sainte-Marthe de Francis Caste, pour sublimer le pire.
Quelque part, A Loner, à l’image de sa pochette, nous propose un regard en plongée sur un sentiment de solitude tenace… existentielle. Celle qui pousse à commettre les pires excès, quand on finit par se sentir trop à l’étroit dans sa peau, et inutile.